Investissement locatif défiscalisé : quel devoir de conseil ?
Du coté des mandataires
Gare aux simulations. Dans une affaire, des particuliers acquièrent en Vefa des lots dans une résidence, à titre d’investissement immobilier locatif défiscalisé. Se plaignant de difficultés avérées pour louer, ils ont demandé l’annulation des ventes, et ont assigné tout à la fois le vendeur, son mandataire (chargé de la commercialisation), et les notaires chargés de dresser les actes de vente. La Cour de cassation a récemment approuvé l’annulation des ventes pour dol, en jugeant que le mandataire était responsable du préjudice causé. Elle a relevé, en l’espèce, que son intention dolosive était démontrée au vu de la simulation précontractuelle remise aux acquéreurs, dont il découlait que le gain fiscal pouvant être tiré de l’investissement avait été «artificiellement» augmenté du double. Le mode de calcul utilisé dans la simulation était «destiné à endormir la vigilance des cocontractants» , et avait été un «outil de tromperie» , caractérisant une fraude. En l’espèce, le mandataire a été condamné à une indemnisation au titre de la perte de chance pour les acquéreurs «de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses»(Cass. 3e civ. 20.04.2022 - 8 arrêts) .
Gare aux aléas et risques. Dans une autre affaire, la Cour de cassation a approuvé la condamnation d’un mandataire, chargé de commercialiser des produits en résidence de tourisme, avec bail commercial régularisé avec un exploitant, au titre de son devoir d’information et de conseil. Motif ? Les « informations fournies aux futurs acquéreurs présentaient le projet comme dénué de tout risque, avec la sécurité de loyers garantis pendant une durée irrévocable de neuf ans, sans comporter la moindre réserve sur les risques liés à l’éventuelle défaillance du preneur à bail». La «sécurité de l’opération» avait été essentielle pour les acquéreurs , il en résultait une «absence d’aléa», justifiant la condamnation du mandataire, en l’espèce, à supporter «l’intégralité de la perte de loyers subie»(Cass. 3e civ. 02.02.2022 13 arrêts) .
Conseil. Dans toute publicité pour un investissement «Pinel/Pinel+» (CGI art. 199 novovicies) , veillez à y insérer la mention requise (notice) sur les risques afférents (C. conso. art. L 122-23) .
Retrouvez les précisions, exemples et commentaires du Mémento Vente immobilière sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 18, n° 8.
Du côté des notaires
Devoir de conseil : en droit. Dans l’affaire jugée le 20.04.2022, la Cour de cassation a posé le principe (inédit) suivant : le «notaire instrumentaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties sur la portée, les effets et les risques, notamment juridiques et fiscaux, de l’acte par lequel elles s’engagent, dans la limite des possibilités de contrôle et de vérification qui lui sont offertes, des informations connues des parties et sans avoir à porter d’appréciation sur l’opportunité économique de l’opération».
Devoir de conseil : en pratique. Dans l’affaire jugée le 20.04.2022, la Cour de cassation a écarté la responsabilité des notaires au titre de leur devoir d’information et de conseil. Motifs ? Les notaires avaient envoyé leurs projets d’actes à l’avance aux acquéreurs, en prenant soin d’indiquer qu’ils étaient à leur disposition pour répondre à toute remarque. Les acquéreurs ne leur avaient pas demandé de contrôler la simulation, qui ne leur avait pas été communiquée et «n’était pas un document contractuel nécessaire à l’efficacité» des actes de vente. Notons que dans une autre affaire, pour un investissement en résidence de tourisme, la Cour de cassation a également jugé «qu’en l’absence d’élément de nature à alerter le notaire sur des difficultés à venir, celui-ci n’avait pas l’obligation de vérifier la faisabilité et les risques de l’opération»(Cass. 3e civ. 20.04.2022, n° 21-12087) .
Notice sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 18, n° 8.