VALEURS MOBILIÈRES - 13.09.2022

Abattement « dirigeants » partant à la retraite : Bercy prend des positions favorables

Bercy a commenté les aménagements de l'abattement « dirigeants » opérés par la loi de finances pour 2022 en prenant des positions favorables (BOI-RPPM-PVBMI-20-40 du 5-7-2022) .

Un bref rappel préliminaire

Les plus-values réalisées par les dirigeants qui cèdent leur société à l'occasion de leur départ en retraite sont, sous certaines conditions , réduites d'un abattement fixe de 500 000 € , quelles que soient les modalités d'imposition de ces gains : prélèvement forfaitaire unique (PFU) ou option pour le barème progressif de l'impôt sur le revenu (IR).

La loi de finances pour 2022 :

  • a prorogé de 2 ans, soit jusqu'au 31 décembre 2024, le dispositif de l'abattement fixe dit « dirigeants » prévu à l'article 150-0 D ter du CGI ;
  • et a accordé à certains dirigeants souhaitant en bénéficier un délai supplémentaire de 1 an pour céder leurs titres.

Précisions sur les modalités d'application de l'allongement de 1 an pour céder les titres

Pour pouvoir bénéficier de l'abattement, le dirigeant doit notamment cesser toute fonction dans la société dont les titres sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite dans les 2 années suivant ou précédant la cession. Cette double condition doit être satisfaite au cours d'une période de 4 années allant de 2 ans avant à 2 ans après la cession.

Afin de tenir compte des difficultés liées au contexte économique et sanitaire, ce délai a été porté à 3 années pour les dirigeants ayant fait valoir leurs droits à la retraite entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2021, à condition que ce départ en retraite précède la cession.

Date de la cessation des fonctions

L' appréciation du délai de 3 ans pour céder les titres diffère selon que la cessation des fonctions est antérieure ou postérieure à la cession (étant rappelé que le départ à la retraite doit nécessairement précéder la cession) :

  • cessation des fonctions avant la cession : il ne doit pas s'écouler un délai supérieur à 3 ans entre le premier de ces événements (départ en retraite ou cessation de fonctions) et la cession ;
  • cessation des fonctions après la cession : il ne doit pas s'écouler un délai supérieur à 6 ans entre le départ en retraite et la cessation des fonctions, sans que le délai écoulé entre chacun de ces deux événements et la cession excède 3 ans.

Cas de cessions échelonnées

L'administration confirme que l'allongement du délai de 1 an pour céder les titres joue également en cas de cessions échelonnées intervenant postérieurement au départ à la retraite.

À noter

On rappelle que, pour l'application de l'abattement fixe, la cession doit porter :

  • sur l'intégralité des droits détenus par le cédant dans la société ;
  • ou, lorsque ce dernier détient plus de 50 % des droits de vote, sur plus de 50 % de ces droits.

Pour apprécier la condition de cession totale ou majoritaire, l'administration admet que plusieurs cessions puissent être cumulativement prises en compte.

Dans ce cas, le reliquat d'abattement non utilisé lors de la première cession est imputable sur les gains nets retirés des autres cessions.

Pour déterminer si la condition de cession totale (ou, le cas échéant, majoritaire) est remplie, l'administration admet les points suivants :

  • cessation des fonctions et départ à la retraite à la même date : les cessions intervenues après cette date sont prises en compte, sous réserve qu'il ne s'écoule pas un délai supérieur à 3 ans entre ces deux événements et la dernière des cessions (BOI-RPPM-PVBMI-20-40-10-30 n° 45)  ;
  • cessation des fonctions et départ à la retraite à des dates différentes : toute cession intervenue dans les 3 ans suivant le départ à la retraite est prise en compte cumulativement, sous réserve qu'il ne s'écoule pas un délai supérieur à 3 ans entre les deux événements (cessation des fonctions et départ à la retraite) et que la cessation des fonctions est postérieure au départ à la retraite (BOI-RPPM-PVBMI-20-40-10-30 n° 55) .

Exemple

Un dirigeant a fait valoir ses droits à la retraite le 1er  janvier 2020 et cesse ses fonctions le 1er  janvier 2022.

Pour l'appréciation de la condition tenant à la cession totale (ou majoritaire), il convient de prendre en compte les cessions intervenues entre le 1er  janvier 2020 et le 1er  janvier 2023.

Lorsqu'il ne s'écoule pas un délai supérieur à 3 ans entre le départ à la retraite et la cessation antérieure des fonctions, l'administration admet, pour déterminer si la condition de cession totale (ou majoritaire) est remplie, de prendre en compte, cumulativement, toute cession intervenue après le départ à la retraite et dans les 3 ans de la cessation des fonctions (BOI-RPPM-PVBMI-20-40-10-30 n° 55) .

Exemple

Un dirigeant a cessé ses fonctions le 1er  juin 2018 et a fait valoir ses droits à la retraite le 1er  janvier 2019, sans avoir encore effectué aucune cession à cette dernière date.

Pour l'appréciation de la condition tenant à la cession totale (ou majoritaire), il convient de prendre en compte les cessions intervenues entre le 1er  janvier 2019 et le 31 mai 2021.

Par tolérance, lorsque la cessation des fonctions intervient entre 3 et 6 ans suivant le départ en retraite, peuvent être prises en compte, cumulativement, les cessions qui sont distantes de moins de 3 ans de ces deux événements (BOI-RPPM-PVBMI-20-40-10-30 n° 65) .

Exemple

Un dirigeant a fait valoir ses droits à la retraite le 30 avril 2020 et cesse ses fonctions le 30 avril 2024.

Pour l'appréciation de la condition tenant à la cession totale (ou majoritaire), il convient de prendre en compte les cessions intervenues entre le 30 avril 2021 et le 30 avril 2023.

Remise en cause de l'abattement fixe

La loi prévoit qu'en cas de non-respect du délai de 3 ans l'abattement fixe est remis en cause au titre de l'année au cours de laquelle intervient le terme de ce délai.

L'administration confirme que sont visées l'une ou l'autre des hypothèses suivantes (BOI-RPPM-PVBMI-20-40-20 n° 165)  :

  • le cédant n'a pas respecté la condition de cession totale ou majoritaire des titres au terme du délai de 3 ans ;
  • il n'a pas, au terme du même délai, cessé toute fonction dans la société.

Éligibilité à l'abattement des dirigeants de SAS non habilités à représenter la société

Les dirigeants de sociétés par actions simplifiées (SAS) sont éligibles à l'abattement « dirigeants » s'ils exercent ou ont exercé dans la société dont ils cèdent les titres l'une des fonctions suivantes : président du conseil d'administration, directeur général, président du conseil de surveillance, membre du directoire (CGI art. 150-0 D ter, II-2°-a et 1655 quinquies) ou directeur général délégué (BOI-RPPM-PVBMI-20-40-10-40 n° 40) .

Jusqu'à présent, l'administration subordonnait le bénéfice de l'avantage fiscal à la condition que l'étendue des fonctions soit, conformément aux statuts de la société, au moins équivalente à celles exercées dans les sociétés anonymes (SA), ce qui impliquait notamment que la société soit investie d'un pouvoir de représentation à l'égard des tiers.

L'administration supprime cette condition. Elle tire en effet les conséquences d'une décision du 21 octobre 2020 par laquelle le Conseil d'État a jugé que la plus-value réalisée par le directeur général d'une SAS à l'occasion de son départ à la retraite peut être réduite de l'abattement « dirigeants », alors même que ce directeur n'est pas habilité à représenter la société (CE 21-10-2020 n° 437598) .

Parallèlement, la même suppression est opérée dans les commentaires du régime des actifs professionnels en matière d' impôt sur la fortune immobilière (IFI)(BOI-PAT-IFI-30-10-30-10 n° 140) . L'administration considérait en effet jusque-là que les associés directeurs généraux et directeurs généraux délégués de SAS ne pouvaient se prévaloir de l'exonération des actifs professionnels qu'à la condition d'être investis d'un pouvoir de représentation de la société opposable aux tiers.

À noter

Avant 2018, l'article 150-0 D ter du CGI renvoyait, pour la nature des fonctions éligibles à l'abattement, à celles mentionnées à l'article 885 O bis du même Code en matière de biens professionnels exonérés d'ISF. Par sa décision du 21 octobre 2020 rendue pour l'application de l'ancien abattement du tiers en vigueur avant 2013, le Conseil d'État avait remis en cause la position de l'administration en matière d'ISF, et par voie de conséquence celle applicable à l'abattement.

Depuis 2018, les fonctions de direction sont directement énumérées, s'agissant de l'abattement, à l'article 150-0 D ter du CGI et, s'agissant des actifs professionnels exonérés d'IFI (qui a pris le relais de l'ISF), à l'article 975, III-1-1° du même Code. Les commentaires administratifs consacrés à ces deux dispositions, qui avaient repris en substance sur ce point ceux exprimés en matière d'ISF, n'avaient pas encore intégré la jurisprudence du Conseil d'État.

  • On rappelle que, en cas de cession de titres à une entreprise, le cédant ne doit pas détenir, directement ou indirectement, de droits de vote ou de droits dans les bénéfices sociaux de l'entreprise cessionnaire. Cette condition s'apprécie à la date de la cession et doit être respectée au cours des 3 années suivantes. L'administration indique que, en cas de rachat par la société émettrice de ses actions, la condition de non-détention de droits de vote ou de droits dans les bénéfices sociaux de l'entreprise cessionnaire doit être appréciée immédiatement après l'opération et pendant les 3 années suivantes (BOI-RPPM-PVBMI-20-40-10-40 n° 485) .

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