DROIT DE PRÉEMPTION - VENTE - 09.09.2022

Renonciation à préemption par une commune : du nouveau

Le Conseil d’État a rendu en juin 2022 une décision majeure pour le cas où une commune renonce à acquérir un bien immobilier, après avoir exercé en ordre son droit de préemption urbain (DPU), à l’occasion de la vente du bien. Quelle leçon en tirer ?

En cas de renonciation à préempter…

Cas de figure 1. Après avoir exercé son droit de préemption urbain (DPU) lors de la vente d’un bien, le titulaire du droit de préemption (commune ou intercommunalité) «peut renoncer en cours de procédure à l’exercice de son droit, à défaut d’accord sur le prix»(C. urb. art. L 213-7, al. 1) .

Cas de figure 2. En cas de fixation judiciaire du prix du bien préempté par le juge de l’expropriation, la commune (ou intercommunalité) peut également renoncer à la mutation, pendant un délai de deux mois après que la décision juridictionnelle soit devenue définitive (C. urb. art. L 213-7 al. 1) .

Conseil. Dans les deux cas de renonciation, le propriétaire peut vendre le bien au prix prévu dans sa déclaration d’intention d’aliéner (DIA), avec prix révisable en fonction de l’indice «ICC». Il peut vendre le bien dans un délai de trois ans sans avoir à déposer une nouvelle DIA (C. urb. art. L 213-8) .

Retrouvez les précisions, exemples et commentaires du Mémento Vente immobilière sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 18, n° 12.

Un droit à indemnisation possible…

Où la renonciation cause un préjudice… Dans une affaire, un opérateur décide de vendre un immeuble (vacant), qui est préempté par la commune. Mais celle-ci décide ensuite de renoncer à l’acquisition, après fixation du prix par le juge. Cette renonciation est très lourde de conséquences pour l’opérateur. Alors qu’il devait vendre le bien à un acquéreur pour un prix de 1 095 000 €, il peut finalement le vendre uniquement pour un prix de 400 000 €, en raison de dégradations liées à la présence d’occupants illégaux et le pillage du mobilier. Il décide de réclamer réparation à la commune, dans le cadre d’un recours indemnitaire.

Une évolution majeure… Appelé à se prononcer, le Conseil d’État a jugé pour la première fois le 13.06.2022 que la responsabilité dite sans faute d’une commune (c’est-à-dire sans faute à prouver) pouvait être engagée lorsqu’un vendeur a subi, du fait de ses décisions de préemption et de renonciation, «un préjudice grave, qui a revêtu un caractère spécial et doit être regardé comme excédant les aléas ou sujétions que doivent normalement supporter des vendeurs de terrains situés en zone urbaine». En l’espèce, le Conseil d’État a estimé que le préjudice subi par l’opérateur, du fait de la renonciation, justifiait son indemnisation à hauteur de 250 000 € (CE 13.06.2022 n° 437160) .

Nos conseils

Recours en indemnisation. La responsabilité dite sans faute d’une commune peut ainsi être engagée du fait d’une décision légale de préemption puis de renonciation à l’exercice du DPU, si les conditions de mise en œuvre d’une telle responsabilité sont réunies (preuve d’un préjudice grave et spécial). Nous conseillons vivement aux opérateurs de faire appel à un avocat spécialisé pour apprécier (au cas par cas) les «perspectives» (aléas) d’une procédure en indemnisation devant le juge administratif (prévoir de monter un solide dossier…).

Bien vacant : attention ! Dans l’affaire jugée le 13.06.2022, le Conseil d’État a estimé que l’abstention de l’opérateur à prendre des mesures, destinées à assurer en temps utile le gardiennage de l’immeuble, constituait une «imprudence dans l’appréciation des risques» de nature à exonérer la commune d’une partie des conséquences dommageables de la renonciation à la préemption (en l’espèce, pour 100 000 €). Voilà qui invite à veiller à bien faire le nécessaire pour sécuriser tout bien vacant/inoccupé, dans le cadre d’une vente…

Notice sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 18, n° 12.

Un vendeur peut réclamer une indemnisation sur le fondement de la responsabilité dite sans faute à une commune, qui a préempté un bien puis a renoncé à l’acquérir (en ordre), s’il peut justifier d’un préjudice grave pouvant être regardé comme excédant les aléas ou sujétions que doivent normalement supporter des vendeurs, en zone urbaine.

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