COMMERCE - MARKETING - CLIENTS - 02.09.2022

Une vente résiliée pour défaut de conseil ?

En tant que vendeur professionnel, vous êtes tenu d’une obligation de conseil envers vos clients. Quelle est l’étendue de cette obligation, et que risquez-vous si vous ne la respectez pas ? Nos conseils à partir d’un cas jugé récemment.

Les faits

Un particulier achète un camping-car pour faire un voyage d’un an avec cinq de ses proches à travers le continent américain. À la livraison, il demande au vendeur d’installer des équipements complémentaires. L’essieu arrière du véhicule fléchit lors du voyage, ce qui est dû, révèle une expertise, à un excès de poids.

L’acheteur demande la résolution de la vente et des dommages et intérêts, invoquant un manquement du vendeur et du fabricant à leur obligation d’information et de conseil sur le poids du véhicule.

La décision du juge

La décision de la Cour d’appel de Rennes… La Cour rejette la demande pour les raisons suivantes : le véhicule livré conformément à la commande initiale était apte à l’usage prévu par l’acheteur ; la surcharge de poids résultait de l’installation à sa demande d’équipements optionnels après la livraison ; la facture de livraison comportait les mentions « attention au poids » et « chaque accessoire supplémentaire diminue la charge utile » ; si cette mention ne précisait pas le poids des équipements déjà installés, elle était suffisante pour attirer l’attention du client sur la charge du véhicule et particulièrement sur l’incidence de l’installation de nouveaux équipements sur le poids du véhicule, l’acheteur devant, en sa qualité de conducteur, surveiller la charge de son véhicule pour demeurer dans les limites de poids définies par son permis de conduire.

… cassée par la Cour de cassation. Le vendeur professionnel est tenu, avant la vente, d’une obligation de conseil qui lui impose de se renseigner sur les besoins de l’acheteur, afin d’être en mesure de l’informer sur l’adéquation entre le bien qui est proposé et l’usage qui en est prévu. La Cour d’appel n’avait pas constaté que le vendeur s’était informé des besoins de l’acheteur et, en particulier, de la charge utile qui lui était nécessaire pour mener à bien son projet de voyage (Cass. 1e civ. 11.05.2022 n° 20-22.210 F-B) .

Un devoir de conseil

Une obligation… L’obligation de conseil du vendeur professionnel, telle que définie ci-dessus, résulte d’une jurisprudence constante (Cass. 1e civ. 28.10.2010 n° 09-16.913 F-PBI ; Cass. 1e civ. 12.09.2019 n° 18-16.504 F-D) .

… d’interroger le client sur l’usage prévu. Même si son client ne précise pas un usage spécifique du bien qu’il se propose d’acheter, le vendeur doit l’interroger sur l’usage prévu. La Cour de cassation avait déjà jugé que le vendeur d’un abri de piscine, que le poids de la neige avait fait s’effondrer, n’était pas exonéré de son obligation de conseil du seul fait que l’abri fourni était conforme à la réglementation et qu’il avait avisé l’acheteur de la nécessité de ne pas laisser la neige s’y accumuler (Cass. 1e civ. 17.01.2018 n° 16-27.016 F-D) . Dans le même esprit, la Cour de cassation refuse ici de prendre en compte le fait que le vendeur avait alerté l’acheteur sur le poids du camping-car et que l’acheteur devait, en tant que conducteur, surveiller ce poids.

Une exception. Le vendeur est exonéré de son obligation de conseil à l’égard d’un acheteur connaissant les caractéristiques essentielles des biens vendus (Cass. 1e civ. 14.01.2016 n° 14-29.908 F-D) ou disposant, en sa qualité de professionnel, des moyens d’apprécier ces caractéristiques (Cass. com. 11.03.2020 n° 19-11.742 F-D) .

À moins que l’acheteur connaisse les caractéristiques essentielles du bien vendu ou qu’il dispose, en sa qualité de professionnel, des moyens d’apprécier ces caractéristiques, vous devez interroger votre client sur l’usage prévu du bien qu’il envisage d’acheter, pour éviter par la suite une résolution de la vente et le paiement de dommages et intérêts si le bien ne répondait pas à cet usage.

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