Un souci pour l’alimentation en eau potable ou l’électricité ?
Raccordement au réseau d’eau potable
La problématique. En 2010, un particulier vend une maison d’habitation. Mais l’acquéreur décide ensuite de demander l’annulation de la vente pour dol, au motif que le vendeur lui a dissimulé que la maison n’est pas alimentée… en eau potable.
La décision. La Cour de cassation a validé la demande d’annulation, au vu du principe inédit suivant : «l’acquéreur d’une maison d’habitation, même située en zone rurale, est en droit de s’attendre à ce que celle-ci soit alimentée en eau potable» . En l’espèce, l’acte de vente ne contenait aucune information sur l’absence de raccordement à un réseau d’eau potable, alors que la maison n’était pas desservie. Le certificat d’urbanisme, délivré lors de la vente, ne permettait pas à l’acquéreur de déduire que la maison était dépourvue de toute eau potable. En outre, l’acquéreur n’avait été informé, avant la vente et son entrée dans les lieux, de l’absence de raccordement. Ce défaut d’information, lors de la formation du contrat, sur l’absence d’alimentation de la maison en eau potable, s’analysait en une «réticence dolosive» (Cass. 3e civ. 26‑10‑2022 n° 20-15382 - déjà, dans le même sens : Cass. 3e civ. 10‑2‑1999 n° 97-18430) .
En pratique. Tout vendeur se doit ainsi d’informer tout (candidat) acquéreur d’une maison du raccordement (ou non) au réseau d’eau potable. Il est aussi tenu d’un «devoir d’information portant sur le raccordement» pour un bien précédemment alimenté en eau potable, mais dont le branchement a été supprimé (Cass. 3e civ. 28‑6‑2000 n° 98-20376). Côté agent immobilier et notaire, pour une vente, veillez à faire le nécessaire, à ce sujet. Pensez aussi à bien respecter la réglementation particulière pour l’assainissement ( (lire l'article) .
Raccordement au réseau électrique
La problématique. Une personne achète un terrain sur lequel elle construit un bien d’habitation. Mais le gestionnaire du réseau de distribution d’électricité (Enedis) refuse d’effectuer le branchement au réseau électrique du terrain, ou bien procède à la suppression du raccordement de la propriété au réseau électrique (par ex., à la demande du maire, en raison d’un problème d’urbanisme).
La décision. La Cour de cassation a jugé que le refus de raccorder un immeuble au réseau électrique, qui est une «mesure de police de l’urbanisme destinée à assurer le respect des règles d’utilisation du sol» , ne peut «résulter que d’une décision de l’autorité administrative compétente». À défaut, le refus de raccorder «et la privation d’électricité en résultant» constituent un «trouble manifestement illicite»(Cass. 3e civ. 12‑10‑2022 n° 21-17040 ; dans le même sens : Cass. 3e civ. 15‑6‑2017, n° 16-16838) . Cette jurisprudence paraît transposable pour le raccordement aux réseaux d’eau, de gaz ou de téléphone (cf. C. urb. art. L 111-12) .
En pratique. Si Enedis refuse d’effectuer le raccordement (ou le rétablir), un acquéreur peut demander, par le biais d’une procédure civile en référé, sa condamnation à faire le nécessaire, sous astreinte. Il en va notamment ainsi si l’injonction du maire de supprimer le branchement d’une construction a été/est annulée par le juge administratif.
Conseil. En cas de litige, il est possible de saisir le «Comité de règlement des différends et sanctions» ( https://www.cre.fr ). Notons que, pour ce comité appelé CoRDiS, Enedis doit opérer un raccordement «conformément au référentiel technique qu’il a publié, en répondant aux besoins en électricité de l’utilisateur, selon le tracé réalisable d’un point de vue technique et administratif»(CoRDiS, décision 06-38-22 du 29‑8‑2022) .