VENTE IMMOBILIÈRE - DIVERS - 02.12.2022

Commercialisation de bien défiscalisé : nouvelles décisions

La Cour de cassation a rendu le 26‑10‑2022 trois importants arrêts lorsqu’un particulier, après avoir acheté en Vefa un logement à titre d’investissement immobilier locatif bénéficiant d’une défiscalisation, prétend avoir été lésé. Les décisions méritent l’attention...

Pour la rentabilité/valeur du produit...

Les affaires. Des particuliers achètent, en 2005, des appartements dans une résidence de tourisme, à titre d’investissement immobilier locatif défiscalisé. Ces produits sont commercialisés dans le cadre d’un programme en vente en l’état futur d’achèvement (Vefa), par l’intermédiaire d’un opérateur (mandataire). Les logements concernés sont loués avec un bail commercial à un exploitant, pour une durée de neuf ans, moyennant un certain loyer. Lors du renouvellement des baux, en raison de la baisse de rentabilité des appartements, de nouveaux baux sont conclus avec des loyers revus à la baisse de presque 50 %.

Les décisions. Se plaignant d’une baisse de rentabilité et d’une surévaluation de la valeur de leurs biens, les acquéreurs ont demandé l’annulation des ventes pour dol, mais aussi réparation au vendeur et son mandataire, pour manquement à leur devoir de conseil. La Cour d’appel, saisie des affaires, a écarté les demandes. Mais la Cour de cassation a censuré ses arrêts (Cass. 3e civ. 26‑10‑2022 - 3 arrêts - n° 21-19898 21-19899 et 21-19900) .

Gare aux pratiques «trompeuses»...

Dol = annulation possible de la vente. Pour la Cour de cassation, les juges se devaient de «rechercher si, lors de la conclusion de la vente, les acquéreurs n’avaient pas été induits en erreur sur la rentabilité et la valeur des biens par des manoeuvres dolosives consistant en la conclusion d’un fonds de concours avec l’exploitant et la cession à celui-ci des locaux destinés à l’accueil et à la réception de la résidence, dissimulés aux acquéreurs, ainsi qu’en l’absence d’analyse des prix du marché par un organisme indépendant» . Nos précédents conseils restent plus que jamais d’actualité (AC Immobilier 18e année, n° 8, p. 6) .

Action = délai «flottant». Il a été jugé que la prescription (quinquennale) de l’action en nullité pour dol a pour point de départ le jour où un acquéreur a «découvert l’erreur qu’il allègue» , par ex. le caractère excessif du prix de vente du produit défiscalisé (Cass. 3e civ. 15‑6‑2022 n° 21-15726, adde: C. civ. art. 1144) . Il n’en reste pas moins qu’il revient à un acquéreur de rapporter la preuve d’un dol ou de manoeuvres dolosives lors de la vente (Cass. 3e civ. 15‑6‑2022 n° 21-15735) .

Prudence de mise côté opérateurs...

Pour l’action de l’acquéreur... Dans nos affaires, la Cour d’appel avait aussi jugé que le point de départ de l’action en responsabilité contre le vendeur et son mandataire, pour manquement à leur obligation d’information et de conseil, devait être fixé au jour de la signature des actes de vente.

Un délai «flottant»... Les arrêts d’appel ont été censurés par la Cour de cassation pour violation de l’article L 110-4 du Code de commerce, texte qui fixe le délai de prescription (5 ans) pour une action en justice à l’égard d’un commerçant (cf. aussi C. civ. art. 2224) . La Cour de cassation a posé le principe (inédit) suivant : «s’agissant d’un investissement immobilier locatif avec défiscalisation, la manifestation du dommage pour l’acquéreur ne peut résulter que de faits susceptibles de lui révéler l’impossibilité d’obtenir la rentabilité prévue lors de la conclusion du contrat» .

À prendre en compte... Côté opérateurs, si vous intervenez pour la vente de produits défiscalisés, veillez à conserver dans vos archives tous les documents permettant de faire écarter votre responsabilité en cas de litige, comme dans une affaire (Cass. 1e civ. 1‑6‑2022 2 arrêts n° 21-11789 et 21-12366) . Si vous êtes un agent immobilier spécialisé dans l’immobilier de placement, veillez à pouvoir prouver avoir attiré l’attention du client «sur l’ensemble des risques du placement proposé»(Cass. 3e civ. 21‑9‑2022 - 2 arrêts n° 20-21043 et n° 20-21044) .

Arrêts sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 18, n° 18.

Côté opérateurs/mandataires, prohibez toute pratique de nature à induire en erreur un acquéreur sur la rentabilité du produit. Veillez à conserver tous les documents utiles pour vous défendre s‘il recherche votre responsabilité au titre de devoir d’information.


Pour aller plus loin


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