BÂTIMENT ‑ URBANISME - 31.01.2023

Pièce exigée à tort pour une autorisation d’urbanisme ?

Le Conseil d’État a rendu en décembre 2022 une importante décision, dans le cas où une commune demande à tort une pièce (complémentaire) pour l’instruction d’un dossier d’autorisation d’urbanisme (permis de construire, etc.). Leçon à tirer ?

Pour les pièces exigibles…

Pièces exigibles. Depuis la loi «Elan» du 23‑11‑2018, un dossier déposé pour une autorisation d’urbanisme (AU) relevant du droit commun (permis de construire ou d’aménager (PC/PA), déclaration préalable (DP)) ne «peut comprendre que les pièces nécessaires à la vérification du respect du droit de l’Union européenne, des règles relatives à l’utilisation des sols et à l’implantation, à la destination, à la nature, à l’architecture, aux dimensions et à l’assainissement des constructions et à l’aménagement de leurs abords ainsi que des dispositions relatives à la salubrité ou à la sécurité publique»(C. urb. art. L 423‑1) .

En cas de pièce manquante. Lorsqu’un dossier ne comprend pas (toutes) les pièces exigibles, une commune (ou l’autorité compétente) dispose d’un délai d’un mois, à compter de la réception ou du dépôt du dossier en mairie, pour réclamer par LRAR, de façon exhaustive , les pièces manquantes (C. urb. art. R 423‑38) . Dans ce cas, afin de faire courir le délai d’instruction, veillez à lui transmettre les pièces sous trois mois, faute de quoi la demande fera l’objet d’une décision «tacite» de rejet ou d’opposition (C. urb. art. R 423‑39) . Une demande de pièce manquante, notifiée après la fin du délai d’un mois, ou qui ne porte pas sur une pièce exigible, n’a pas pour effet de modifier les délais d’instruction d’un dossier (C. urb. art. R 423‑41) .

Conseil. Si un permis (PC/PA) est accordé, ce permis ne peut être annulé en justice, au motif que le dossier ne comportait pas une pièce exigible ou comportait des documents «insuffisants, imprécis» (ou avec des inexactitudes), que «dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l’appréciation (…) sur la conformité du projet à la réglementation»(CE 10‑10‑2022 n° 452955) .

… une décision majeure et positive !

En droit. Par un arrêt de principe rendu le 9‑12‑2022, qui vaut revirement de jurisprudence, le Conseil d’État a posé les règles suivantes. D’une part, à l’issue du délai d’instruction prévu pour un PC/PA ou une DP, « naît une décision de non‑opposition à déclaration préalable ou un permis tacite» . D’autre part, le «délai d’instruction n’est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n’est pas exigée» . Enfin, et il s’agit là d’une règle inédite qui lève toute discussion, une «décision de non‑opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l’expiration du délai d’instruction, sans qu’une telle demande puisse y faire obstacle»(CE 9‑12‑2022 n° 454521) .

En pratique. Ainsi, si une commune (ou l’autorité compétente) réclame une pièce qui n’est pas exigible pour un PC/PA ou une DP, le délai d’instruction continue à courir, et le pétitionnaire peut, au terme de ce délai, se prévaloir d’une décision de non‑opposition à DP, ou d’un permis tacite. En outre, au vu de l’arrêt du 9‑12‑2022, si le maire (ou l’autorité compétente) décide de refuser le PC/PA ou de s’opposer aux travaux (DP), sa décision doit être qualifiée de «décision de retrait de l’AU tacitement obtenue» (décision de retrait). En faisant simple, cette décision peut être contestée, à bon droit, faute de respect de la procédure contradictoire préalable, prévue en cas de retrait d’une AU, notamment.

Conseil 1. Selon les cas, un pétitionnaire peut avoir intérêt à attendre la fin du délai de trois mois prévu pour un retrait (C. urb. art. L 424‑5) , pour demander un certificat de permis tacite ou de non-opposition (C. urb. art. R 424‑13) .

Conseil 2. Pour la construction d’un immeuble (collectif) avec des logements, un maire peut (continuer à) demander qu’un plan intérieur de l’immeuble soit joint au dossier de PC, à notre avis (C. urb. art. L 423‑1, al. 4 et art. R 431‑34‑1) .

Si une commune demande à tort une pièce qui n’est pas exigible, un pétitionnaire (PC/PA) ou l’auteur d’une déclaration préalable (DP) peut se prévaloir d’un permis tacite ou d’une décision de non‑opposition (DP), à l’issue du délai d’instruction.

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