Non-paiement des cotisations sociales du dirigeant : attention à la banqueroute !
Les faits
Un entrepreneur, condamné à régler à l’Urssaf des cotisations sociales impayées, tente de se soustraire à cette condamnation en retirant de l’argent de ses comptes bancaires et en transférant une partie de son patrimoine à son fils.
L’Urssaf dépose une plainte contre lui et agit pour qu’il soit placé en redressement judiciaire. Une procédure de redressement puis de liquidation judiciaire est ouverte à son encontre.
Le tribunal déclare alors l’entrepreneur coupable de banqueroute, ce qu’il conteste.
La décison du juge
Le juge rappelle qu’un entrepreneur peut être déclaré coupable de banqueroute par augmentation frauduleuse du passif, en vertu de l’article L 654‑2, 3° du Code de commerce.
Il ajoute que cet article n’exclut aucune modalité d’augmentation du passif.
Il relève que le défaut de paiement des cotisations par l’entrepreneur n’était pas le résultat d’un oubli, mais d’une volonté ; que les multiples contestations des contraintes délivrées par l’Urssaf s’analysaient non comme une inaction, mais comme des agissements répétés ; et que le caractère frauduleux de ces agissements était corroboré par le fait, d’une part, qu’il avait soustrait une partie des sommes impayées des comptes de son entreprise, et d’autre part, que son comportement avait conduit à la cessation des paiements et avait perduré après la date de celle-ci, augmentant le passif de l’entreprise.
Il décide que le comportement de l’entrepreneur était frauduleux, dès lors qu’il consistait en une omission, manifestement délibérée, de s’acquitter des cotisations sociales dues, et que l’entrepreneur pouvait ainsi être déclaré coupable de banqueroute par augmentation frauduleuse du passif (Cass. crim. 1‑2‑2023 n° 22‑82.368) .
La banqueroute
Une augmentation frauduleuse du passif… Les personnes physiques exerçant à titre individuel, ainsi que les dirigeants ou les représentants permanents des dirigeants personnes morales, peuvent, si leur entreprise fait l’objet d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, être déclarés coupables de banqueroute, s’ils ont frauduleusement augmenté le passif de cette entreprise (C. com. art. L 654‑2, 3°) . Ils s’exposent notamment, dans ce cas, à un emprisonnement de cinq ans et à une amende de 75 000 €.
… par un acte positif… A p.ex. été reconnu coupable de ce délit le gérant d’une société qui, méconnaissant une décision de justice ayant autorisé la poursuite de l’activité de la société pendant trois mois pour la liquidation du stock, avait ultérieurement acheté des marchandises demeurées impayées, alors qu’elles avaient ensuite été revendues (Cass. crim. 16‑6‑1999 n° 98‑83.835) .
… ou par une omission. Dans la présente décision, la Cour de cassation applique cette disposition à un cas où la fraude résulte non pas d’un acte positif du prévenu, mais d’une omission. La Haute Juridiction confirme ici un principe déjà dégagé : une augmentation frauduleuse du passif peut résulter du fait de soustraire volontairement une société à l’impôt en France, conduisant à un redressement fiscal et entraînant une augmentation des charges de la société et la cessation de ses paiements (Cass. com. 29‑4‑2014 n° 13‑12.563) .