VENTE IMMOBILIÈRE - COMPROMIS DE VENTE - 11.05.2012

Compromis vite signé = vente parfaite ?

Une agence dûment mandatée trouve vite un acquéreur au prix convenu, et lui fait sur le champ régulariser un compromis. Mais le vendeur refuse de le signer ! Furieux, l’acquéreur veut agir en exécution forcée de la vente. Pas si vite...

Gare à la désillusion...

Une affaire rondement menée... Un propriétaire confie le 19.04.07 un mandat de vente à un agent immobilier (AI) pour un bien à présenter au prix maximal de 350 000 €. L’AI annonce vite le bien sur Internet, à ce prix. Intéressé, le Sieur X s’empresse de faire le 22 une offre écrite... pour ce montant. L’AI dresse alors un compromis que X signe... dès le 25. On ne peut faire mieux, mais...

Virant au parcours du combattant... Patatras, le vendeur refuse de signer le compromis ! Qu’à cela ne tienne, le Sieur X décide de l’assigner en exécution forcée de la vente. S’ensuit alors un long procès. Après une première cassation, la Cour d’appel de renvoi donne raison à X. Elle déclare la vente parfaite, estimant que le vendeur était tenu de signer le compromis, au vu de l’art. 1998 du C. Civil (droit commun des mandats). Pour motiver son arrêt, elle s’appuie sur les clauses (d’usa­ge) du mandat, par lesquelles le vendeur s’est engagé à signer tout avant-contrat aux conditions fixées tout en laissant soin à l’AI de « recueillir la signature de l’acquéreur ». Elle estime que si le mandat ne permettait certes pas à l’AI de signer lui même le compromis, il l’autorisait en revanche à formuler pour le compte de son client une offre de vente engageant nécessairement celui-ci en cas d’acceptation par un acquéreur (aux conditions prévues). Dès lors, le sieur X ayant accepté par écrit l’offre de vente (sic) publiée sur Internet au prix maximal, elle juge que le caractère parfait de la vente n’est pas contestable et la rencontre des consentements sur la chose et le prix constituée. Une argumentation bien séduisante, mais...

Qui tourne au cauchemar... L’arrêt d’appel vient d’être censuré. Motif ? Le mandat de l’AI ne comportait pas de clause expresse par laquelle son client lui donnait pouvoir de le représenter pour conclure la vente (civ. 3e, 12.04.12). En clair, de régulariser le compromis en ses lieu et place...

... à défaut de vrai mandat de « vente » !

Dura lex, sed lex ! La Cour de cassation s’en tient et conforte sa lecture rigide de l’art. 72 al. 3 du décret Hoguet. Ce texte d’ordre public prévoit que, lorsque le mandat d’un AI en transaction comporte l’autorisation de s’engager pour une opération déterminée, ce mandat en fait expressément mention. Il a été jugé à ce titre que le mandat d’un AI n’est par principe qu’un mandat d’entremise consistant en la recherche de clients et la négociation, ou l’une de ces missions seulement (civ. 1e, 08.07.86). Et qu’un mandat ne lui permet pas ­d’engager (en clair lier) le vendeur sauf clause expresse l’y autorisant (civ. 1e, 06.03.96).

Un malentendu compréhensible. Le mandat de recherche d’un acquéreur (et de négociation) est souvent appelé mandat de vente, par commodité évidente. Mais ce terme peut induire en erreur un acquéreur sur la portée exacte du compromis qu’il peut vite signer dans les locaux de l’AI lorsque celui-ci n’a pas été expressément habilité par son client à finaliser la vente (ce qui est fréquent).

Moralité ? Sauf à justifier d’une offre acceptée par le vendeur, sans ambiguïté sur les conditions de la vente (prix...), notre acquéreur se gardera bien de se lancer dans un long et couteux procès en exécution forcée si l’AI n’a pas reçu mission expresse de signer lui-même le compromis. Reste qu’il peut (à l’instar de l’AI lui-même) réclamer réparation au vendeur, sous forme de dommages et intérêts.

Sans acceptation préalable de l’offre par le vendeur ou de clause expresse du mandat de l’agent immobilier de le signer à sa place, le compromis ne vaut pas vente parfaite. Mais des dommages et intérêts peuvent être réclamés.

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