SÉCURITÉ AU TRAVAIL - 20.10.2015

Les tests de dépistage de drogues

Procédant par analogie avec le dépistage de l’alcoolémie qui permet de sanctionner s’il y a lieu, des employeurs ont songé à pratiquer des tests de dépistage de la consommation de drogues et, le cas échéant, de sanctionner. Mauvaise appréciation du problème.

Une affaire récente...

Le problème. Nul n’ignore que l’usage de drogues diminue la vigilance et les réflexes, modifie les perceptions et la capacité de réflexion, et accroît ainsi le risque d’accident du travail. Or, l’employeur est tenu par une obligation de sécurité de résultat à l’égard de ses salariés et il est également responsable des dommages causés aux tiers par son activité. D’où l’idée, par analogie entre l’éthylotest et les tests salivaires, de contrôler l’usage de drogues.

L’arrêt de la CAA de Marseille...  Une entreprise de travaux publics a inséré dans son règlement intérieur la possibilité de recourir à des tests salivaires de la consommation de drogues, limitée aux seuls salariés occupant des postes sensibles, pratiqués par leur supérieur hiérarchique et pouvant déboucher sur des sanctions s’ils sont positifs. L’inspecteur du travail a enjoint à l’employeur de retirer cette disposition, considérant que ces tests étaient des analyses biologiques ne pouvant être pratiqués que par un médecin et que le recours à des sanctions disciplinaires était incompatible avec le secret médical. La Cour administrative d’appel de Marseille a considéré que « la mise en place d’un dispositif de détection de la consommation de produits stupéfiants permettant de contrôler l’aptitude d’un salarié à occuper son poste de travail et d’assurer la sécurité des travailleurs peut figurer dans le règlement intérieur » . La Cour a ajouté que « le recours à des tests salivaires de dépistage de consommation de produits stupéfiants tel qu’il était mis en place par le projet de règlement intérieur (...) c’est-à-dire en faisant pratiquer ces tests par un supérieur hiérarchique et en prévoyant la possibilité d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement dans l’hypothèse d’un résultat positif, porte, eu égard à l’absence de respect du secret médical et, au surplus, de fiabilité suffisante, en l’état des tests salivaires existants à ce jour, d’un résultat positif, une atteinte disproportionnée aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives par rapport au but recherché »(CAA Marseille 21.08.2015 n° 14MA02413) .

... s’inscrit dans une ligne commune. La CAA donne raison à l’administration (DGT, « Repères pour une politique de prévention des risques liés à la consommation de drogues en milieu professionnel », Documentation française) et rejoint la position du Comité consultatif national d’éthique (Avis CCNE du 19.05.2011 avis n° 114) .

... riche d’enseignements

Pas de dépistage systématique. C’est l’évidence même et ce n’est d’ailleurs même pas rappelé dans la décision de la CAA.

Validité du dépistage. La CAA admet le principe de détecter la consommation de drogue, mais pas dans un objectif de sanction, mais dans le but de vérifier l’aptitude du salarié à occuper son poste.

Illicéité des tests salivaires par la hiérarchie. Pour la CAA, les tests salivaires ne sont pas encore suffisamment fiables. Par ailleurs et surtout, le rapport entre prise de drogue et sécurité au travail n’est pas automatique, a contrario de l’alcool.

De la sanction à la prévention. Les juges, comme l’administration du travail, considèrent que la finalité des contrôles doit être, non pas la sanction mais la prévention. Le salarié devrait donc être retiré à titre conservatoire de son poste de travail si celui-ci expose autrui à un danger. Le médecin du travail doit apprécier son aptitude à tenir le poste. Sinon, le salarié sera reclassé.

Vous pouvez indiquer dans le règlement intérieur que le travail sous l’emprise de produits stupéfiants est interdit. Le contrôle de l’emprise de la drogue au temps du travail doit être étudié avec le CHSCT et le médecin du travail dans le but de détecter les salariés à risque et les positionner sur d’autres emplois.

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