VALEURS MOBILIÈRES - 03.12.2020

Vous cédez des valeurs mobilières étrangères ? La plus ou moins-value réalisée doit intégrer le gain ou la perte de change

Le gain ou la perte de change est une composante de la plus ou moins-value de cession de valeurs mobilières (ou de droits sociaux) réalisée. En conséquence, les prix d’acquisition et de cession à retenir pour déterminer la plus-value réalisée à l’occasion de la cession de valeurs mobilières étrangères doivent être convertis en euros par application des taux de change applicables respectivement à la date d’acquisition et à la date de cession des titres en cause (CAA Paris 31-7-2020 n° 19PA02095) .

Position du problème : comment déterminer la plus-value lorsque le prix de cession est libellé en monnaie étrangère ?

La loi ne donne pas de précisions

L’article 150-0 D, 1 du CGI prévoit que la plus ou moins-value de cession de valeurs mobilières est constituée par la différence entre le prix effectif de cession des titres (net des frais et taxes) et leur prix d’acquisition.

La loi ne précise pas, en revanche, les modalités de détermination de la plus-value lorsque le prix de cession est libellé en monnaie étrangère.

En pratique, deux méthodes s’opposent

Ces deux méthodes sont les suivantes :

  • soit convertir en euros la plus-value calculée en devises étrangères par application du taux de change en vigueur à la date de la cession, méthode défendue en l’espèce par le contribuable : cette première méthode lui est plus favorable dans l’hypothèse où la devise étrangère s’est appréciée (autrement dit, a pris de la valeur) entre l’acquisition et la cession des titres ;
  • soit convertir les prix d’acquisition et de cession selon les taux de change applicables lors de l’acquisition et de la cession avant de calculer la plus-value, méthode défendue en l’espèce par l’administration : cette seconde méthode est en revanche plus favorable au contribuable si, à l’inverse, la devise s’est dépréciée.

Exemple 1

Des actions sont achetées en devise au prix de 5 000 et revendues dans la même devise au prix de 7 000. La plus-value en devise est de 2 000.

La devise s’apprécie par rapport à l’euro (c’est-à-dire que la devise prend de la valeur entre la date d’acquisition et la date de cession).

Les taux de change sont de :

  • à la date de l’achat : 1 unité de devise = 5 € ;
  • à la date de la vente : 1 unité de devise = 6 €.

1re méthode, conversion en euros de la plus-value en devise : 12 000 € (2 000 × 6 €).

2e méthode, conversion en euros des prix d’achat et de vente en devise puis calcul de la plus-value en euros : 17 000 € [(7 000 × 6 €) - (5 000 × 5 €) = 42 000 - 25 000].

Exemple 2

Mêmes hypothèses de départ, mais la devise se déprécie par rapport à l’euro (c’est-à-dire qu’elle perd de la valeur entre la date d’acquisition et la date de cession).

Les taux de change sont de :

  • à la date de l’achat : 1 unité de devise = 5 € ;
  • à la date de la vente : 1 unité de devise = 4 €.

1re méthode, conversion en euros de la plus-value en devise : 8 000 € (2 000 × 4 €).

2e méthode, conversion en euros des prix d’achat et de vente en devise puis calcul de la plus-value en euros : 3 000 € [(7 000 × 4 €) - (5 000 × 5 €) = 28 000 - 25 000].

Pour la cour administrative d’appel de Paris, il faut prendre en compte le gain de change dans le calcul de la plus-value

La cour administrative d’appel de Paris juge que le gain (ou la perte) de change est une composante de la plus-value (ou de la moins-value) réalisée et doit être pris en compte dans le calcul de la plus-value.

Elle tranche donc pour la seconde méthode .

En conséquence, les prix d’acquisition et de cession à retenir pour déterminer la plus-value doivent être convertis en euros par application des taux de change applicables respectivement à la date d’acquisition et à la date de cession des titres en cause.

Par suite, la cour valide la méthode de calcul retenue par l’administration. Elle souligne que l’administration n’a pas méconnu la doctrine administrative, laquelle n’ajoute rien à la loi :

  • aux termes de cette doctrine relative à la définition du prix de cession , en cas de transaction sur un marché situé hors de France, le cours doit être converti en euros par application du taux de change applicable à la date de l’opération (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-10-10 n° 20)  ;
  • le pendant de cette doctrine pour le prix d’acquisition est rédigé de manière rigoureusement identique (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-20 n° 170) .

La solution de la cour de Paris est donc dans la ligne de la doctrine administrative.

À noter

Il ressort des conclusions du rapporteur public, Mme Stoltz-Valette, que le contribuable se prévalait en l’espèce d’un arrêt du 16 mai 2007 de la cour administrative d’appel de Nancy concernant une plus-value sur titres réalisée en Suisse (CAA Nancy 16-5-2007 n° 05NC01153, inédit) . Par cet arrêt, la cour de Nancy a pour sa part privilégié la première méthode, seule à même d’éliminer l’effet de l’évolution à la hausse du taux de change dans l’évaluation des plus-values réalisées. Mais, comme le relève le rapporteur public, la solution de la cour de Nancy est peu motivée.

Cette solution, qui n’est pas celle retenue en l’espèce, est cependant plus logique d’un point de vue économique :

  • elle conduit, en effet, à distinguer le profit résultant du gain de change de celui qui résulte de la plus-value ;
  • et elle permet ainsi d’éviter au contribuable d’être imposé sur une somme qu’il n’a pas réellement perçue.
  • La cour administrative d’appel de Paris transpose au cas des plus-values sur valeurs mobilières la solution retenue en matière de plus-value immobilière privée par la cour administrative d’appel de Marseille (CAA Marseille 4-2-2020 n° 18MA04333, inédit) .
  • Par cette décision, la cour a jugé qu’il résulte des articles 150 U et 150 V du CGI que le gain ou la perte de change associé à la cession à titre onéreux d’un bien immobilier (en l’espèce situé aux États-Unis), qui constitue une composante de la plus-value ou moins-value réalisée, est pris en compte pour la détermination de la plus ou moins-value brute. Est sans incidence à cet égard la circonstance que l’impôt payé aux États-Unis, imputable, en vertu de la convention fiscale bilatérale, sur l’impôt dû en France, ait été calculé sur le montant de la plus-value en dollars.
  • Selon nos informations, le pourvoi contre cette décision a été admis. Nous attendrons avec intérêt la solution du Conseil d’État sur cette question.

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