Déplafonnement du loyer d’un bail commercial pour modification des facteurs locaux de commercialité : comment ?
Pour déplafonner au titre des FLC...
Vous avez dit «déplafonner» ? Au renouvellement d’un bail 3/6/9 (initial/renouvelé), un bailleur peut demander que le montant du loyer du locataire soit réajusté au vu de la valeur locative (réelle) des locaux (sans le plafond ILC/ILAT). Il peut notamment, à ce titre, arguer de changements dans l’environnement des locaux. En droit, la demande doit être fondée sur le fondement de la modification notable des «facteurs locaux de commercialité» - FLC (C. com. arts. L 145-34 al. 1 et L 145-33 4°) .
Vous avez dit «FLC» ? Un texte précise que les FLC «dépendent principalement de l’intérêt que présente, pour le commerce considéré, l’importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l’attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l’emplacement pour l’activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d’une manière durable ou provisoire»(C. com. art. R 145-6) .
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Une décision à prendre en compte...
Affaire vécue. Un propriétaire de locaux, loués à un locataire avec un bail renouvelé en 2006, décide de demander au titre des FLC un loyer déplafonné, lors du renouvellement (2015). Au vu du rapport d’expertise judiciaire, une Cour d’appel fait droit à sa demande, car l’expert a constaté une évolution des FLC sur les périodes 1988-2017 et 2006-2017, notamment une évolution démographique et une progression des flux de véhicules, aux alentours de la commune concernée. Pour les juges, ces périodes sont pertinentes, car intégrant une évolution constante dans le même sens depuis de nombreuses années et qui a vocation à perdurer.
La décision. La Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel, pour les motifs suivants. Au titre des FLC, seule une «évolution notable au cours du bail à renouveler et jusqu’à la date d’effet du nouveau bail permet, si elle a une incidence favorable sur l’activité exercée dans les locaux loués, d’écarter la règle du plafonnement du loyer du bail renouvelé et de le fixer selon la valeur locative» . À cet égard, les éléments retenus par la Cour d’appel étaient des «motifs insuffisants à caractériser sur la seule période du bail à renouveler jusqu’à la date d’effet du nouveau bail» , une modification des FLC «présentant un caractère notable et ayant eu une incidence favorable» sur l’activité du locataire (Cass. 3e civ. 25‑1‑2024 n° 22-21006) .
Sur les conditions requises...
Double condition 1. Pour obtenir un déplafonnement du loyer, un bailleur doit prouver une modification notable des FLC, laquelle doit avoir eu une «incidence favorable» sur le commerce concerné. L’incidence doit «s’apprécier in concreto»(CA Montpellier 9‑1‑2024 RG 21/01102 Portalis DBVK-V-B7F-O4DV) . ll en a été jugé ainsi au vu d’aménagements publics ayant eu une incidence «indéniable» sur la fréquentation d’un commerce (Cass. 3e civ. 1‑7‑2015 n° 14-13056) , ou ayant impliqué une «augmentation de la clientèle potentielle»(CA Paris 1‑2‑2024 RG 21/04148 Portalis 35L7-V-B7F-CDGZQ) .
Double condition 2. La modification «notable» et l’incidence «favorable» s’apprécient au regard de la seule période du bail expiré. Un bailleur ne peut donc se prévaloir d’une période antérieure ou d’une évolution (même) prévisible dans le futur.
Conseil. L’arrêt du 25‑1‑2024, qui a fait droit à la demande indemnitaire du locataire pour procédure abusive, invite à y réfléchir à deux fois avant de s’engager dans un procès, sans solide dossier.
Arrêt sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 20, n° 1.