CONGÉS PAYÉS - DROIT À CONGÉS - 25.04.2024

Calcul du droit à cp : les nouvelles règles

Les règles d’acquisition des congés payés en cas de maladie et d’AT/MP ont été modifiées. En voici les détails, avec leurs conséquences pratiques (loi   2024-364 du 22‑4‑2024 art.   37) .

Calcul des cp : rappel du revirement

En septembre 2023, les juges ont refusé d’appliquer la loi française relative à l’incidence des absences pour maladie et AT, et considèrent désormais que les cp ne peuvent pas être réduits du fait d’un arrêt maladie ou AT/MP, quelle qu’en soit la durée. Selon cette nouvelle jurisprudence, le salarié qui n’aurait eu que des absences maladie ou AT aurait droit à ses 30 j. de cp. Le texte voté et désormais applicable limite en partie les conséquences de cette jurisprudence.

En pratique. Pour rappel, jusqu’à présent donnait droit à 2,5 j. ouvrables de cp tout mois ou période de 4 semaines de travail effectif ou assimilé pour le calcul des cp : l’employeur comptait donc les périodes de travail de 4 semaines en y assimilant notamment les périodes d’AT/MP dans la limite de 1 an, mais pas celles de maladie.

Calcul du droit à cp : les modifications

Prise en compte totale de l’AT/MP. La limite de 1 an pour l’assimilation des absences pour AT/MP est supprimée : quelle que soit sa durée, elle est traitée comme du travail pour calculer les cp. Un salarié absent pour AT pendant 2 ans aura donc droit à 30 j. ouvrables pour la 1e  année et 30 j. ouvrables pour la 2e  année d’absence (C.   trav. art. L   3141-5) .

Prise en compte «   partielle   » de la maladie. L’absence pour maladie/accident non professionnel est désormais assimilée à du travail, mais ne donne lieu qu’à 2 j. de cp au lieu de 2,5 j., dans la limite de 24 j. En d’autres termes, elle est prise en compte pour calculer les 24 j. ouvrables de congé principal, et neutralisée seulement pour le droit à la 5e  semaine (C.   trav. art. L   3141-5 et L   3141‑5‑1) . Le calcul du droit à cp comporte donc désormais 2 règles :

  • calcul des 24 j. de congé principal sans impact des absences maladie ;
  • calcul des 6 j. de 5e  semaine en les déduisant du temps de travail effectif pris en compte.

À savoir. Que ce soit pour la maladie ou l’AT/MP, les conséquences de ces règles sont limitées par les nouvelles règles de report des cp non pris du fait de maladie ou AT/MP (ACP 5/24 « Nouveau report légal des cp : à gérer ») .

Conséquences sur le calcul

Règle des équivalences. Pour rappel, pour calculer les cp, équivaut à 1 mois toute période de 4 sem., ce qui fait que 48 sem. de travail effectif ou assimilé suffisent à générer des cp complets. Jusqu’ici le nombre de périodes de 4 sem. était multiplié par 2,5 j. ouvrables de cp, et plafonné à 30 j.

Proposition de méthode. L’application de la règle des équivalences et le fait que les absences maladie ne génèrent que 2 j. de cp au lieu de 2,5 j. compliquent le calcul des cp, a fortiori si les cp conventionnels sont supérieurs aux cp légaux, ou s’il y a aussi des absences non assimilées. Il nous semble possible, en pratique, d’appliquer une méthode de calcul en 2 temps : le cp principal à raison de 2 j./mois (ou 4 sem.) de travail et la 5e  semaine à raison de 0,5 j./mois (ou 4 sem.).

Exemple 1. Salarié travaillant 5 j./sem. Il a donc un droit à cp complet s’il a travaillé 12 fois 4 sem. de 5 j. soit 240 j. Du 1‑6‑2023 au 31‑5‑2024, il a eu : 1 sem. de sans solde (5 j.), 3 j. de congé décès, et 17 sem. (85 j.) de maladie. Les 3 j. de congé décès étant assimilés à du travail, il a travaillé sur les 262 j. ouvrés du 1‑6‑2023 au 31‑5‑2024 : 262 j. - (5 + 85 j.) = 172 j., soit 172/5/4 = 8,6 périodes de 4 sem. assimilées à 1 mois. Son droit à cp est donc de :

  • sur les 24 j. de cp principal : (172 j. de travail + 85 j. de maladie = 257 j./5/4 = 12,85 mois plafonnés à 12) × 2 j. ouvrables = 24 j. ;
  • sur la 5e  sem. : seul compte le temps de travail et le congé décès, soit 8,6 × 0,5 j. ouvrables = 4,3 j. ;
  • soit un total de 28,3 j. arrondis à 29 j.

Conseil. À notre avis, c’est en effet cette méthode qui respecte au mieux le cumul de cette nouvelle règle avec celle des équivalences. L’autre méthode consisterait à calculer les cp séparément pour les périodes de travail (2,5 j.), pour les périodes de maladie (2 j.) et pour les absences non assimilées (0). Dans cet exemple, le salarié a été absent 18 semaines, soit 18 × 12/52 = 4,15 mois :

  • il a donc 7,85 mois de travail × 2,5 j. = 19,63 j. ;
  • 17 sem. de maladie, soit 17 × 12/52 = 3,92 mois × 2 j. = 7,84 j. ;
  • la sem. de sans solde ne donnant pas droit à cp, il a 19,63 + 7,84 = 27,47 arrondis à 28 jours, et donc, 1 j. de moins.

Calcul en jours ouvrés. Si l’entreprise calcule les cp en jours ouvrés (30 j. ouvrables = 25 j. ouvrés), le calcul est alors le suivant :

  • pour les 4 sem. de cp principal : nombre de mois y compris absences maladie/AT × 1,6667 j., plafonnés à 20 j. ouvrés ;
  • pour la 5e  sem. : nombre de mois sans les absences maladie × 0,4167 j. ouvrés, limités à 5 j.

En pratique : évaluation de la maladie neutralisée
Pour un salarié qui n’aurait, au cours de la période de référence que des absences pour maladie, celles-ci ne réduisant désormais plus que la 5e  semaine, sachez que, du fait des règles d’équivalences et d’arrondi, c’est environ à partir de 12 semaines de maladie que la 5e  semaine sera réduite.

Jours conventionnels supplémentaires. Si des cp supplémentaires existent, (pour ancienneté, ou droit global supérieur), à notre avis, sauf disposition conventionnelle contraire, ils suivent le régime de la 5e  semaine, donc sans intégration de la maladie dans le temps de travail. La méthode la plus simple semble de les calculer séparément, en retenant comme temps de travail le travail effectif et assimilé, donc avec l’absence AT éventuelle.

Exemple 2. Cp calculés en j. ouvrés, et salarié travaillant 5 j./sem., avec droit à 2 j. pour ancienneté. Il a donc un droit à cp complet de 25 j. ouvrés + 2 j. d’ancienneté s’il a travaillé 12 fois 4 sem. de 5 j. soit 240 j. Du 1‑6‑2023 au 31‑5‑2024, il a eu : 3 sem. d’AT (15 j.), et 13 semaines (65 j.) de maladie. L’absence AT étant comptée comme du travail pour tous les cp, sont pris en compte : 262 j. ouvrés du 1‑6‑2023 au 31‑5‑2024 - 65 j. de maladie = 197 j., soit 197/5/4 = 9,85 périodes de 4 sem. assimilées à 1 mois. Son droit à cp est donc de :

  • sur les 20 j. de cp principal : (197 j. de travail + 65 j. de maladie = 262 j./5/4 = 13,1 mois plafonnés à 12) × 1,66 j. ouvrés = 19,92 j. ouvrés ;
  • sur la 5e  sem. : seul compte le temps de travail, avec l’AT, soit 9,85 × 0,4167 j. ouvrés = 4,04 j. ;
  • sur les 2 j. ouvrés pour ancienneté : seul compte le temps de travail, y compris l’AT, soit 2 j. × 9,85/12 mois = 1,64 j. ouvré ;
  • soit un total de 19,92 + 4,14 + 1,64 = 25,70 j. arrondis à 26 j. ouvrés, au lieu de 27 j. s’il n’y avait pas eu d’absence maladie.

Incidence sur l’indemnité de congés

L’indemnité de cp est égale au 1/10 de la rémunération perçue pendant la période de référence, sans pouvoir être inférieure au salaire que le salarié aurait perçu s’il avait travaillé (maintien de salaire). Auparavant, pour calculer le 1/10, l’employeur prenait donc en compte la rémunération perçue par le salarié hors périodes de maladie indemnisées non assimilées à du travail pour le calcul des cp. Désormais, la maladie donnant droit à 80 % des cp, il devra la prendre en compte à hauteur de 80 % (C.   trav. art. L   3141-24)  : en pratique, que le salarié ait été indemnisé ou non, il devra prendre en compte 80 % du montant de l’absence qu’il avait calculé pour ces périodes.

À savoir. La loi étend la prise en compte de 80 % de la rémunération des périodes de maladie à l’indemnité compensatrice de cp des intérimaires, et en profite aussi pour assimiler à du travail pour le calcul des cp les congés de paternité et d’accueil d’un enfant (C.   trav. art. L   1251-19) .

Congés légaux pour enfants à charge
Pour rappel, les cp légaux pour enfant se calculent séparément car leurs règles de réduction sont déjà dans le texte, et le changement de régime se fera automatiquement (C.   trav. art. L   3141-8)  :
    • les moins de 21 ans bénéficient de 2 j./enfant, réduits à 1 j. si le droit total est ≤ 6 j. Ce dernier sera calculé selon les nouvelles règles, mais continuera à déterminer la réduction ou non des 2 j., comme auparavant ;
    • pour les 21 ans et plus, ces 2 j. ne peuvent porter les cp à plus de 30 j. Ainsi, seuls les salariés ayant un droit réduit (24 jours réduits pour absence hors AT et maladie et/ou 5e  semaine réduite pour absence hors AT) pourront en bénéficier.

Une règle rétroactive

Le principe. La prise en compte de la maladie pour le cp principal et les règles de report s’appliquent rétroactivement depuis le 1‑12‑2009. La loi limite toutefois la possibilité pour les salariés en poste de demander la prise des cp calculés sur les absences maladie de chacune de ces périodes (loi, II) .

À savoir. La rétroactivité ne vise pas la suppression de la limite de 1 an pour l’assimilation de l’AT.

Salariés en poste. Ces salariés, qui, pour rappel, ne peuvent pas demander d’indemnité compensatrice, mais seulement la prise des cp (ACP 5/24 « Loi cp : appliquer la rétroactivité aux salariés en poste »)  :

  • ont jusqu’au 23‑4‑2026 (2 ans après l’entrée en vigueur de la loi) pour les demander en justice ;
  • et seulement à concurrence des 4 semaines (24 j. ouvrables/20 j. ouvrés) de cp principal sur ces périodes, s’ils ne les avaient pas déjà acquis.

À savoir. En pratique, l’employeur peut donc décider d’attendre les demandes en justice pour régulariser la situation des périodes antérieures : celles qui n’en auront pas fait l’objet avant le 24‑4‑2026 n’auront alors plus à être régularisées.

Salariés sortis. Rien de spécifique n’étant prévu, iIs devraient pouvoir demander, pour chaque période de référence depuis 2008/2009, une indemnité représentant le supplément de cp lié à la prise en compte de la maladie pour le cp principal. Ils auraient en principe à notre avis, 3 ans (C.   trav. art. L   3245-1) pour agir à compter de la rupture.

Voici les éléments de calcul des cp selon les nouvelles règles légales, avec, à notre avis, dès lors qu’il existe des absences pour maladie, la nécessité de calculer séparément le congé principal et la 5e  semaine. Ces interprétations et exemples nécessitent toutefois confirmation par l’administration, qui pourrait ultérieurement retenir d’autres règles.

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