BANQUE & CRÉDIT - 14.04.2022

Assurance d'un prêt souscrit par un particulier pour financer un immeuble privé : la résiliation à tout moment et sans frais bientôt possible !

La « loi Lemoine » a pour objectif affiché de rendre le régime de l’assurance emprunteur plus souple et plus lisible pour l’emprunteur : possibilité de résilier à tout moment, mais aussi suppression du questionnaire médical pour la part assurée n'excédant pas 200 000 € par emprunteur lorsque l'échéance intervient avant les 60 ans de ce dernier, réduction à 5 ans du droit à l’oubli des anciens malades quel que soit l'âge (Loi 2022-270 du 28-2-2022) .

Quelques explications préliminaires

Le recours au crédit en vue d'acquérir un bien immobilier à titre privé est une nécessité pour la plupart des particuliers.

Les banques conditionnent généralement l’octroi d’un prêt immobilier à la souscription d’une assurance destinée à garantir le remboursement du prêt en cas de chômage, d’invalidité ou de décès de l’emprunteur.

Cette assurance est souvent souscrite directement auprès du prêteur, qui propose à l’emprunteur d’adhérer à un contrat d’assurance collective (« contrat d’assurance groupe »). L’emprunteur peut cependant choisir un autre contrat d’assurance, y compris auprès d’un autre assureur, ou en changer en cours de prêt, sous certaines conditions.

En pratique, il était très difficile pour l’emprunteur d’exercer son droit de changer d’assurance puisque confronté à de nombreux obstacles, résultant à la fois de la lourdeur du processus mis en place par la loi et de la force d’inertie des banques : manque d’information sur l’exercice de ce droit, délais de traitement anormalement longs, réponses lacunaires ou refus de changement non suffisamment motivés (Rapport AN n° 4699 relatif à la loi 2022-270 p. 10 et 11) .

La résiliation dite « infra-annuelle » va être autorisée

Les emprunteurs immobiliers pourront résilier, à tout moment et sans frais, leur contrat d’assurance du prêt (C. ass. art. L 113-12-2, al. 1 modifié)  :

  • dès le 1er juin 2022 pour les nouvelles offres de prêt ;
  • à compter du 1er septembre 2022 pour les contrats d’assurance en cours d’exécution à cette date.

À noter

Pour rappel, une telle résiliation est actuellement possible :

  • dans les 12 mois de la signature de l’offre de prêt ;
  • puis tous les ans, à la date d’échéance du contrat (autrement dit, à la date anniversaire de la signature de l’offre de prêt par l’emprunteur).

La notification de la demande de résiliation par l'emprunteur sera assouplie

L'emprunteur aura la possibilité de notifier sa demande de résiliation dans les conditions prévues à l'article L 113-14 du Code des assurances, c'est-à-dire :

  • soit par lettre ou tout autre support durable ;
  • soit par déclaration faite au siège social ou chez le représentant de l'assureur ;
  • soit par acte extrajudiciaire ;
  • soit, lorsque l'assureur propose la conclusion de contrat par un mode de communication à distance, par le même mode de communication ;
  • soit par tout autre moyen prévu par le contrat.

À noter

Pour rappel, actuellement cette notification ne peut être effectuée que par lettre recommandée ou par envoi recommandé électronique.

La décision du prêteur sera davantage encadrée

Toute décision de la banque qui finance le prêt refusant la substitution d’assurance devra être « explicite » et comporter « l’intégralité des motifs de refus ». Elle devra, le cas échéant, préciser « les informations et garanties manquantes » (C. consom. art. L 313-30 modifié) .

En cas d’ acceptation de l'assurance choisie par l'emprunteur , le contrat de crédit devra être modifié par voie d’avenant dans un délai désormais encadré : 10 jours ouvrés à compter de la réception de la demande de substitution (C. consom. art. L 313-31 modifié) . En contrepartie de cette acceptation, la banque ne pourra pas modifier les conditions d’octroi du crédit, y compris désormais son mode d’amortissement (C. consom. art. L 313-32 modifié) .

L'obligation d'information à la charge du prêteur et de l'assureur sera renforcée

Avant la formulation de l’offre de prêt, tout document fourni par le prêteur à l’emprunteur devra mentionner le coût de l’assurance en montant total en euros dû par l’emprunteur :

  • non seulement sur la durée totale du prêt, comme c’est le cas actuellement ;
  • mais aussi sur une durée de 8 ans(C. consom. art. L 313-8, 2° modifié) , qui correspond, selon le Comité consultatif du secteur financier (CCSF), à la durée moyenne de remboursement d’un crédit immobilier.

À noter

Selon les rédacteurs du texte, « il s’agit d’un chiffre parlant, à même de nourrir la réflexion de l’assuré lorsqu’il se demande s’il doit ou non engager une substitution de contrat ».

La notice énumérant les risques garantis et précisant les modalités de mise en jeu de l’assurance annexée au contrat de prêt devra par ailleurs indiquer la possibilité pour l’emprunteur de résilier le contrat d’assurance à tout moment à compter de la signature de l’offre de prêt (C. consom. art. L 313-8, dernier al. modifié) .

Enfin, l’assureur devra informer chaque année l’assuré, sur support papier ou sur tout autre support durable, du droit de résiliation , de ses modalités et des différents délais de notification et d’information qu’il devra respecter (C. ass. art. L 113-15-3 nouveau) .

Le prêteur ou l'assureur qui ne respectera pas ces dispositions du Code de la consommation en matière de résiliation du contrat d’assurance du prêt sera passible d’une amende administrative de 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale (C. consom. art. L 341-26-1 et C. ass. art. L 113-15-3, nouveaux) .

Convention Aeras : le droit à l'oubli est renforcé

Le droit à l’oubli, qui, on le rappelle, permet aux personnes ayant été atteintes d’une maladie grave de ne pas le déclarer au moment de souscrire une assurance emprunteur, est renforcé.

Désormais, le droit à l’oubli s’applique dans tous les cas dès lors que 5 ans se sont écoulés après la fin du protocole thérapeutique , en l'absence de rechute ; de plus peuvent en bénéficier les personnes anciennement atteintes d’hépatite C (CSP art. L 1141-5, al. 4 modifié) .

Cette mesure, précise Aeras (Aeras 24-3-2022) s'applique depuis le 2 mars 2022 à tous les nouveaux dossiers. Elle concerne non seulement les prêts immobiliers, mais également :

  • les prêts à la consommation (affectés ou dédiés) ;
  • et les prêts professionnels pour l’acquisition de locaux et/ou de matériels.

À noter

Jusqu'à présent, le droit à l'oubli interdisait aux assureurs de demander, sur les personnes ayant souffert d’un cancer et désireuses de souscrire une assurance, des informations médicales sur ces pathologies :

  • plus de 10 ans après la fin du protocole thérapeutique pour les cancers diagnostiqués à partir de 21 ans ;
  • plus de 5 ans après la fin du protocole théra-peutique pour les cancers diagnostiqués plus tôt.

Le questionnaire médical sera supprimé pour certains prêts immobiliers

Pour rappel, au moment de la conclusion du contrat d’assurance emprunteur, l’assureur doit interroger l’emprunteur afin d’apprécier plus précisément les risques qu’il prend en charge, et celui-ci est tenu de répondre exactement aux questions posées (C. ass. art. L 113-2, 2°) .

À compter du 1er juin 2022, aucune information relative à l’état de santé de l’emprunteur ni aucun examen médical ne pourront être sollicités par l’assureur dès lors que (C. ass. art. L 113-2-1 nouveau)  :

  • la part assurée sur l’encours cumulé des contrats de crédit n’excède pas 200 000 € par emprunteur ;
  • le remboursement du crédit contracté arrive à échéance avant les 60 ans de l’emprunteur.

Ces conditions seront cumulatives .

À noter

Dans le cas d'un prêt souscrit par deux conjoints et garanti à hauteur de 50 % sur la tête de chacun, la part globale assurée prise en compte pourra donc atteindre 400 000 €.

Un décret pourra définir des conditions de montant et d’âge plus favorables pour l’emprunteur.

  • Dans le cadre du droit à l'oubli, les signataires de la convention Aeras (pouvoirs publics, représentants des banques et des assurances, associations de malades et de consommateurs) doivent engager une négociation avant le 1er  juin 2022 pour notamment élargir le bénéfice du droit à l’oubli à d’autres pathologies que le cancer et l’hépatite C (le diabète, par exemple).
  • En l’absence d’accord, cet élargissement sera fixé par décret, au plus tard le 31 juillet 2022.

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