L’indemnité d’éviction, vue des deux côtés
La réponse, côté bailleur
Sauf juste motif... Il faut savoir que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail commercial sans être tenu au versement d’une indemnité s’il justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du locataire, ou s’il est établi que l’immeuble doit être démoli pour insalubrité (reconnue par l’autorité administrative), ou s’il est établi qu’il ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état.
Un préjudice à compenser... À défaut de pouvoir opposer un motif légal l’en exonérant, un bailleur qui refuse de renouveler le bail commercial de son locataire est tenu de lui verser une indemnité dite « d’éviction ».
Montant de l’indemnité ? Il est égal au préjudice causé par le défaut de renouvellement du bail. Le Code de commerce précise, à cet égard, que l’indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que les frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.
Déductible ? Pour savoir si l’indemnité d’éviction versée est ou non déductible, il faut rechercher les raisons du refus de renouvellement du bail. Ainsi, lorsque ce refus est motivé par la volonté et la perspective de conserver ou d’améliorer un revenu, l’indemnité versée est, en principe, déductible. Si l’indemnité constitue une dépense personnelle ou engagée en vue de réaliser un gain en capital, elle ne sera, en principe, pas déductible.
Exemples. La jurisprudence a eu l’occasion de préciser que si le bailleur reprend la disposition de ses locaux pour les relouer dans des conditions financières plus avantageuses, les sommes versées au locataire au titre de son éviction pourront être considérées comme des charges déductibles de ses recettes imposables. À l’inverse, si le bailleur reprend la disposition de son local, par exemple pour le vendre libre de toute occupation, l’indemnité d’éviction versée au locataire ne sera pas déductible.
Conseil. La déduction de l’indemnité pourra être refusée par l’administration fiscale si celle-ci est en mesure d’établir que l’indemnité est dépourvue de contrepartie, qu’elle a une contrepartie dépourvue d’intérêt pour le bailleur, ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
La réponse, côté locataire
Une perte compensée. Là où il a droit à une indemnité à la suite d’un refus de renouvellement de son bail, elle est versée en vue de compenser le préjudice subi du fait de son éviction. Elle permet ainsi une compensation de coûts et frais liés à la résiliation du bail (manque à gagner, frais de réinstallation, coût d’un déménagement, etc.) et la contrepartie d’une perte d’éléments d’actif immobilisé (droit au bail, notamment).
Imposable ! Puisqu’elle est versée en vue de compenser une perte d’actif ou de couvrir divers frais liés au déménagement et à la réinstallation du locataire dans de nouveaux locaux, cette indemnité est imposable. La fraction de l’indemnité destinée à compenser la perte d’un actif suit le régime fiscal des plus-values professionnelles, cette perte étant assimilée à un prix de cession. La fraction de l’indemnité destinée à couvrir les frais de réinstallation, de déménagement, ou encore le manque à gagner, constitue, quant à elle, un profit imposable dans les conditions de droit commun.