IMPOSITION DES ENTREPRISES - FRAIS ET CHARGES - 15.09.2016

Bail commercial : un droit d’entrée déductible ou non ?

Vous allez signer un bail commercial et verser à cette occasion un droit d’entrée au bailleur. Et la déductibilité de cette somme va dépendre de sa nature. À moins de pouvoir désormais l’amortir ? Une décision du Conseil d’État d’avril 2016 change la donne...

Un supplément de loyer...

Un droit d’entrée ou pas de porte. Le droit d’entrée (ou pas de porte) est la somme versée au bailleur par le preneur entrant dans les locaux en vue d’obtenir la jouissance de l’immeuble.

Un supplément de loyer déductible...  Le propriétaire peut être désireux de se prémunir contre une augmentation des loyers qui serait inférieure à l’augmentation de la valeur locative du bien. Le pas de porte est alors assimilé à un supplément de loyer (cas le plus fréquent).

Déduction échelonnée sur la durée du bail. Le pas-de-porte est dans ce cas une charge déductible des résultats, à raison d’une quote-part annuelle calculée de manière linéaire sur la durée du bail.

Une indemnité...

Une contrepartie. Le pas de porte peut aussi être qualifié d’indemnité versée en contrepartie de certains éléments, notamment d’avantages commerciaux fournis par le bailleur sans rapport avec le loyer, ou en contrepartie de la dépréciation de la valeur vénale des locaux.

Non déductible et non amortissable. Qualifié ainsi, le locataire ne peut ni le déduire, ni l’amortir. Il doit être regardé comme constitutif du prix de revient d’un élément incorporel du fonds.

Conseil. La nature du pas-de-porte doit donc être clairement précisée pour assurer sa déduction.

Mais un revirement de jurisprudence ! Une société a pris à bail, pour une durée de 12 ans, des locaux à usage d’entrepôt et de bureaux moyennant, outre un loyer annuel, le versement d’une somme, qualifiée de « droit d’entrée », en contrepartie de la dépréciation du bien du fait de la durée de 12 ans du bail et de la renonciation du bailleur à sa faculté de résiliation du bail pendant six ans. La société a comptabilisé cette somme en immobilisation incorporelle et l’a amortie linéairement sur six ans. À l’occasion d’un contrôle, l’administration a remis en cause la déduction des annuités d’amortissement pratiquées, estimant que ce « droit d’entrée » devait être regardé comme un élément incorporel inscrit à l’actif du bilan qui ne pouvait donner lieu à amortissement. Ce raisonnement est écarté par le Conseil d’État : la CAA de Versailles, qui avait validé l’analyse de l’administration, a commis une erreur de droit en ne recherchant pas si certains éléments du droit d’entrée pouvaient faire l’objet d’un amortissement. Il résultait en effet des stipulations du contrat de bail que la somme acquittée à titre de droit d’entrée avait été versée en contrepartie non seulement de la durée exceptionnelle de 12 années du bail mais aussi de la renonciation du bailleur à sa faculté de résiliation pendant six ans, avantage indépendant du caractère renouvelable du contrat et dont les effets bénéfiques sur l’exploitation cesseraient à une date prévisible, en l’occurrence au bout de six ans (CE 15.04.2016 n° 375796, 383067) .

Bon à savoir. Cette solution n’est pas limitée aux seuls avantages qui résulteraient d’une renonciation du bailleur à sa faculté de résiliation pendant une certaine période, mais pourrait concerner tout avantage qui ne serait pas lié au caractère renouvelable du bail et dont les effets bénéfiques sur l’exploitation cesseraient à une date prévisible.

Conseil. Cette ouverture du Conseil d’État sur l’amortissement du droit d’entrée doit vous amener à être particulièrement vigilant sur la rédaction des clauses du contrat de bail prévoyant le versement d’un tel droit, en indiquant explicitement la nature des avantages non liés au caractère renouvelable du bail qui sont consentis par le bailleur en contrepartie de ce droit d’entrée.

Alors même qu’il ne serait pas déductible au titre d’un supplément de loyer, vous pourrez désormais amortir le droit d’entrée versé au bailleur s’il a pour contrepartie des avantages indépendants du caractère renouvelable du contrat et dont les effets bénéfiques sur l’exploitation cesseront à une date prévisible.

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