ASSURANCES - 25.09.2023

Remboursement anticipé d'un prêt in fine appréciation du préjudice de l'emprunteur

Le dommage résultant du manquement d'une banque à l'obligation d'informer le souscripteur d'un prêt in fine du risque que le rachat de contrats d'assurance-vie, du fait d'une contre-performance de ceux-ci, ne permette pas le remboursement du prêt à son terme consiste en la perte d'une chance d'éviter la réalisation de ce risque (Cass. com. 21‑6‑2023 n° 21-18.312 FS-B) .

Les circonstances de l'affaire

Une SCI conclut un prêt in fine garanti par deux contrats d'assurance-vie souscrits par les associés de la société.

La société et ses associés remboursent par anticipation le prêt in fine, ne sachant pas si la situation des contrats d'assurance-vie leur permettra de rembourser le capital à l'échéance du terme en cas de contre-performance.

Il s'avère qu'à la date d'exigibilité du capital la valeur des contrats d'assurance-vie n'aurait effectivement pas permis le remboursement.

La SCI et ses associés assignent la banque en responsabilité, lui reprochant d'avoir manqué à ses obligations d'information et de conseil.

Ils estiment avoir subi un préjudice : la perte de chance d'éviter le risque de ne pas pouvoir rembourser le capital emprunté grâce au rachat du contrat d'assurance-vie.

La décision de la Cour de cassation

La Cour rejette la demande de la SCI et de ses associés :

  • le dommage résultant du manquement d’une banque à son obligation d’informer le souscripteur d’un prêt in fine du risque que le rachat de contrats d’assurance-vie, du fait d’une contre-performance de ceux-ci, ne permette pas le remboursement du prêt à son terme consiste en la perte d’une chance d’éviter la réalisation de ce risque ;
  • mais, lorsqu'ayant pris conscience de l'existence de ce risque, dont il pouvait légitimement craindre qu'il se réalisât, l'emprunteur rembourse le prêt par anticipation à seule fin d'en prévenir la réalisation, son préjudice consiste en la perte d'une chance , non d'éviter la réalisation du risque, mais d'éviter les conséquences dommageables de ce remboursement anticipé.

Par suite, la valeur de rachat des deux contrats d'assurance-vie à la date du terme initialement prévu est sans incidence sur l'appréciation de ce préjudice.

  • Dans le cadre d’un prêt in fine, les intérêts sont payés au cours des différentes mensualités, tandis que le capital est remboursé en une seul, fois à l’échéance. Ce prêt est souvent garanti par le nantissement d’un ou de plusieurs contrats d’assurance-vie, qui pourront être rachetés par l’emprunteur au terme de l’opération pour rembourser le capital. En cas de contre-performance de l’assurance-vie, il existe alors un risque que la valeur de rachat ne suffise pas à rembourser la totalité du capital emprunté. La banque a l’obligation d’en informer l’emprunteur ; en cas de manquement, le dommage en résultant consiste en la perte d’une chance d’éviter la réalisation du risque (Cass. com. 6‑3‑2019 n° 17-22.668 FS-PB ; Cass. com. 22‑1‑2020 n° 17-20.819 F-D ; Cass. com. 24‑3‑2021 n° 19-20.697 F-D) .
  • La décision ici commentée apporte une précision intéressante quant à la nature du préjudice en cas de remboursement anticipé du prêt in fine.
  • Dans un tel cas, il ne peut pas y avoir perte de chance d’éviter la réalisation du risque de non-remboursement, puisque ce risque a déjà été évité par l’initiative de l’emprunteur.
  • Il y aura, le cas échéant, indemnisation d’un nouveau préjudice correspondant à la perte de chance d’éviter les conséquences dommageables du remboursement anticipé, dont l’appréciation sera logiquement décorrélée de la valeur de rachat des contrats d’assurance-vie à la date du terme initialement prévu.

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