Déplacements et affectations temporaires : en pratique ?
Les déplacements temporaires
Principe. L’affectation temporaire d’un salarié en dehors de son secteur géographique ou de la zone couverte le cas échéant par une clause de mobilité constitue une modification du contrat de travail, ce qui implique donc l’accord préalable du salarié.
Exceptions. À titre dérogatoire, l’accord du salarié n’est pas nécessaire :
- Si l’exercice des fonctions du salarié implique par nature une certaine mobilité ;
- Ou si l’affectation répond aux trois conditions suivantes :
- elle est motivée par l’intérêt de l’entreprise,
- elle est justifiée par des circonstances exceptionnelles,
- et enfin, le salarié a été informé préalablement dans un délai raisonnable du caractère temporaire de l’affectation (Cass. soc. 03.02.2010 n° 08-41412) .
À noter. Dans ces deux cas dérogatoires, il s’agit en effet d’une modification des conditions de travail, qui s’impose au salarié, et non d’une modification du contrat de travail.
Refus = licenciement possible ?
Les faits. Un salarié, employé en qualité d’assistant de chantier par Vinci Construction Terrassement, a été licencié pour faute grave en date du 22.09.2009. Son employeur lui reprochait en effet ses refus successifs d’affectation sur deux chantiers, le premier en Gironde et le second dans les Pyrénées-Atlantiques. Contestant son licenciement, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes. Il faisait notamment valoir que l’affectation n’était pas « justifiée par l’intérêt de l’entreprise », ni par « des circonstances exceptionnelles », et qu’il n’était pas justifié qu’il ait été informé « dans un délai raisonnable du caractère temporaire de l’affectation et de sa durée prévisible ». Dès lors, il s’agissait selon lui d’une modification de son contrat de travail, ce qui obligeait l’employeur à recueillir son accord préalable. Son refus ne pouvait donc justifier un licenciement pour faute grave.
Remarque. Autrement dit, le salarié se prévalait des conditions inhérentes à la 2e exception présentée ci-avant, faisant fi de la 1e exception.
Décision. Les juges ont considéré que l’exception tenant à la nature des fonctions occupées devait s’appliquer dans cette affaire. Ils ont notamment relevé que « le déplacement refusé par le salarié s’inscrivait dans le cadre habituel de son activité d’assistant de chantier », et qu’il s’en déduisait que le « salarié avait manqué à ses obligations contractuelles » (Cass. soc. 02.04.2014 n° 12-19573) .
À noter. Dans cette affaire, le salarié avait par le passé été affecté à 19 reprises sur différents chantiers situés dans l’Est de la France. Quant à la société Vinci Construction Terrassement, elle participe à la construction d’ouvrages d’infrastructures linéaires, de lignes à grande vitesse, d’autoroutes, de routes sur l’ensemble du territoire national.
Attention ! Si dans cette affaire, le refus est fautif, il ne caractérise pas pour autant une faute grave. Les juges ont en effet considéré que la durée du déplacement n’avait pas été précisée au salarié et que ses précédentes affectations avaient toutes eu lieu dans l’Est de la France. Il convient donc de bien considérer l’ensemble des éléments de la situation avant de s’engager dans une procédure de licenciement.