BÂTIMENT - MARCHÉS PUBLICS - 04.12.2023

Décompte général définitif (DGD) tacite à l’initiative du titulaire d’un marché public des travaux : une limite !

Le Conseil d’État a rendu le 9‑11‑2023 une importante décision sur la manière dont le titulaire d’un marché public de travaux peut se prévaloir d’un décompte général définitif (DGD) dit tacite, à l’issue du marché. Enseignement à tirer de la décision ?

Décompte DGD : rappels utiles

En droit. Comme expliqué dans un conseil («Décompte général pour un marché public : du nouveau !» juillet 2022), dans le cadre d’un marché public de travaux soumis au «CCAG Travaux», le titulaire du marché doit prendre en compte une procédure particulière pour réclamer les sommes qui lui sont dues, après réception (CCAG art. 12.3.1 et s. et fiche DAJ) .

En pratique. Le titulaire du marché doit établir un projet de décompte final, à notifier au maître d’œuvre et au maître d’ouvrage (MO), sous 30 jours à compter de la date de notification de la décision de réception. Il revient ensuite au MO d’établir un décompte général, et de le notifier au titulaire du marché dans le délai imparti. Sans contestation sous 30 jours par le titulaire du marché, le décompte général notifié «est réputé être accepté par lui. Il devient alors le décompte général et définitif du marché»(CCAG art. 12‑4‑5) .

Décompte DGD tacite : la précision

Pour opposer un décompte tacite... L’article 12‑4‑4 du CCAG Travaux précise qu’en l’absence de notification par le MO du décompte général dans le délai imparti, le titulaire du marché peut/doit lui notifier un projet de décompte général. Si le MO laisse passer un délai de 10 jours sans réagir, le «projet de décompte général transmis par le titulaire devient le décompte général et définitif»(CCAG art. 12‑4‑4) . Le titulaire du marché peut alors se prévaloir d’un décompte général et définitif (DGD) dit tacite, né du silence gardé par le MO sur le projet de décompte général.

Une limite à intégrer... Dans une affaire, une société s’est prévalue d’un DGD tacite pour réclamer à un MO la somme visée dans son projet de décompte général. Le Conseil d’État lui a donné tort, en posant le principe (inédit) suivant. La «notification au titulaire du marché d’un décompte général, même irrégulier, fait obstacle à l’établissement d’un décompte général et définitif tacite à l’initiative du titulaire» dans les conditions prévues par l’article 12.4.4 du CCAG. En l’espèce, le projet de décompte général avait été notifié par la société en avril 2017, mais le maître d’œuvre lui avait auparavant notifié un décompte général en octobre 2016. Malgré l’irrégularité de cette notification (qui devait être faite par le MO, et non le maître d’oeuvre), pour le Conseil d’État, la société ne «pouvait se prévaloir d’aucun décompte général et définitif tacite dès lors qu’un décompte général lui avait été notifié avant la naissance d’un décompte général et définitif tacite»(CE 9‑11‑2023 n° 469673) .

Ce qu’il faut aussi prendre en compte

À défaut de décompte définitif. Dans son arrêt, le Conseil d’État a souligné qu’il revient au juge administratif, en l’absence de décompte général devenu définitif, de statuer sur les réclamations pécuniaires, présentées en ordre par le titulaire du marché et le MO, pour «déterminer le solde de leurs obligations contractuelles respectives» . Le juge peut prendre en compte par ex. des pénalités de retard, au profit du MO.

Marché à forfait : droit à indemnisation. Le Conseil d’État a précisé que «les difficultés rencontrées dans l’exécution d’un marché à forfait» peuvent ouvrir droit à indemnité au profit du titulaire du marché, mais ceci uniquement si celui-ci «justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat, soit qu’elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l’exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l’estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics» .

Fiche DAJ sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, 23e  année, n° 11.

La notification d’un décompte général même irrégulier (par ex. notifié par le maître d’oeuvre et non le maître d’ouvrage) ne permet pas au titulaire d’un marché public de se prévaloir d’un DGD tacite dans les conditions prévues par le CCAG Travaux.

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