VENTE IMMOBILIÈRE - BIEN À VENDRE - 28.04.2015

« Baissez la musique, on a une visite ! »

Un particulier, après avoir acheté un logement au-dessus d’un bar diffusant de la musique à un volume... très élevé, n’a pas hésité à demander l’annulation de la vente en se prévalant d’un dol du vendeur. Qu’en a pensé le juge ?

Un « cas d’école » à méditer

Vous avez dit « cas d’école » ? Un particulier achète un appartement en copropriété, situé juste au-dessus d’un « bar » installé au RDC. Confronté à de graves nuisances sonores générées par cet établissement, il décide d’assigner son vendeur en annulation de la vente... pour dol (C. civ., art. 1116) . Pour fonder son action, il soutient et peut justifier (semble-t-il) avoir été victime de manœuvres exercées par les « filles » des vendeurs, qui se chargeaient des visites du logement. Lors de ses visites, elles demandaient par « SMS » au responsable du bar, et ce, de façon systématique, de réduire au minimum le volume sonore de la musique diffusée par l’établissement (!).

« Les nuisances ? Il devait savoir ! » La Cour d’appel écarte la demande d’annulation, pour les motifs suivants. Elle souligne que l’acquéreur ne pouvait ignorer qu’il s’exposait à des risques de nuisances sonores provenant du bar. Elle relève en outre que, lors du compromis de vente, un p.-v. d’AG de la copropriété lui avait été remis, faisant état de troubles subis par tous les résidents de l’immeuble, du fait des nuisances générées par le bar...

« Il pouvait vraiment savoir ? » L’arrêt d’appel vient d’être censuré pour défaut de base légale. Relevant que le p.-v. d’AG joint au compromis portait sur un litige bien antérieur à la vente (18 mois), la Cour de cassation estime que les juges se devaient de rechercher si l’acquéreur aurait bien acheté son appartement en l’absence des « manœuvres » des filles des vendeurs, lors de ses visites (Cass. 3e civ. 07.04.2015) . Si l’on ne peut préjuger de sa décision, la Cour d’appel de renvoi pourrait à ce titre sanctionner le vendeur, tel en le condamnant à des dommages et intérêts...

Les enseignements à tirer

Côté vendeurs. L’arrêt invite à y réfléchir à deux fois avant d’œuvrer pour tenter de dissimuler de (graves) nuisances. Un vendeur aura au contraire tout intérêt à révéler toute information utile sur des nuisances qu’un candidat-acquéreur n’est pas en situation de connaître ou découvrir par lui-même. Sans préjudice d’un recours pour « réticence dolosive », il a déjà été jugé que l’acquéreur d’un logement peut se placer sur le terrain de la garantie des vices cachés pour des nuisances acoustiques (graves et généralisées), que le vendeur connaissait ou ne pouvait ignorer (Cass. 3e civ. 20.10.2010) .

Côté agents immobiliers. L’arrêt invite à interpeller et conseiller utilement tout client qui vend un logement sur d’éventuelles nuisances « sonores », liées au voisinage ou l’environnement. En particulier si, tel en l’espèce, le logement se situe au-dessus d’un établissement « potentiellement » bruyant : la prudence est de rigueur. Pour vos annonces, évitez toute formule du type « appartement très calme » ou « quartier tranquille » , si vous ne disposez pas de garanties à ce sujet...

Nuançons...  Il a été récemment jugé qu’un acquéreur ne peut se plaindre de la qualité médiocre de l’isolation phonique d’un logement, vendu par lot après réhabilitation d’une maison ancienne, s’il ne  peut pas prouver qu’il est confronté à des nuisances du voisinage excédant un « niveau normal », ou que la qualité acoustique constituait un élément déterminant de son achat (Cass. 3e civ. 20.01.2015) . La décision est transposable pour la vente d’un logement ancien.

Retrouvez notre notice sur http://astucesetconseils-immobilier.fr/annexe  – code IO 11.06.05.

L’acquéreur d’un logement peut être bien fondé à se prévaloir de « manœuvres » visant à dissimuler la gravité de nuisances sonores liées au voisinage lors de ses visites. Coté agents immobiliers, conseillez utilement vos clients !


Pour aller plus loin


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